Chanter au milieu du silence
November 14, 2025•501 words
Quand on crée, on le fait avec ou sans raison. Pour beaucoup, cela commence discrètement, presque intimement. Un crayon vagabond dans le coin d'une page, une mélodie distraite fredonnée au volant... Très souvent, c'est une étincelle fugace, qui s'éteint aussi vite qu'elle s'est allumée. Mais parfois, elle embrase quelque chose, qu'on ne peut pas éteindre aussi aisément. Ce feu timide au départ s'accroche autant que nous nous y accrochons. Cette flamme rien qu'à nous, on l'attise, on la nourrit. Elle grandit. Puis vient le moment des questions.
« Ce feu est une partie de moi. Suis-je prêt à le partager avec d'autres ? Au fond, n'est-il pas juste un feu comme les autres ? Est-il ridicule ? Suis-je ridicule ? »
Qu'on le veuille ou non, ce qu'on modèle nous reflète. C'est comme exposer une partie de soi ; dans les flammèches, notre visage se dessine, flou ou plus net. Cette étape demande du courage. Tout le monde ne veut pas aller jusque là ; mais certains, oui. Et quand nous prenons ce courage entre nos mains, nous désirons ardemment que cet acte soit récompensé, d'une façon ou d'une autre. Nous voulons que notre création soit vue ; critiquée, applaudie... qu'importe, pourvu qu'elle ne demeure pas dans l'indifférence ! Hélas, c'est souvent le cas. Tout ce travail pour cela... Notre monde aujourd'hui est bardé d'outils pour être vu, et paradoxalement, on y passe d'autant plus inaperçu. C'est frustrant.
Mais d'un autre côté, n'a-t-on pas oublié l'essentiel ? Pourquoi créons-nous, à la base ? Était-ce cette quête d'attention ? Non, c'était cette manière de s'exprimer, de s'émanciper. Cette libération solitaire. Ce qui nous a enflammés, ce n'est pas cette scène devant une salle vide ; c'est ce moment complice avec nous-mêmes. Un monologue avec la quiétude comme toile vierge. Peut-être qu'il y en a qui ne se reconnaîtront pas dans cette vision. Et ce n'est pas grave. Mon message s'adresse à tous.
Le processus créatif est avant tout un chemin solitaire. Et si l'appréciation de la création devait l'être aussi ? Partez ! Arpentez ce chemin que notre esprit a balisé sans nous donner la carte. Perdez-vous. Retrouvez-vous. Avancez. Faites demi-tour. Réjouissez-vous. Enragez. Pleurez. Riez.
Alors écrivez à en brûler vos poignets, dessinez à vous noyer sous la peinture, chantez à en perdre la voix, composez à en pleurer, sculptez à en faire saigner vos doigts… mais créez ! Et surtout, créez pour vous-même.
Chantez au milieu du silence.