L'OPÉRATION DU SAINT-ESPRIT

[FANTAISIE INCONSÉQUENTE]

Tout le monde connaît la Sainte Histoire [1]. Celle de la petite Marie et du bon Joseph, qui, bien que solidement charpenté, demeura de morne bois parvenu dans l'antichambre du virginal office marial. Désespéré de la chose – et peut-être des hommes (ceux du masculin genre en l'occurrence), Dieu-le-Père dut y pourvoir, missionnant un archange, puis sur son céleste fourneau mitonnant une petite opération du Saint-Esprit. Par la vertu de la Sainte Huile, curieuse alchimie, la spermatique divine substance prit, telle une onctueuse mayonnaise catalane. La Marie à Joseph tenait enfin son petit "Christo", trois divines facettes Tout-en-Un, nuances de l'arc-en-ciel, la blanche colombe en sus… et les rois mages en prime. Céleste concert des Anges, applaudissements frénétiques des Élu(e?)s.

Bon, voici donc pour la version officielle : après l'initial ratage de l'Eden Parc, le témoignage d'un laborieux rattrapage pour sortir enfin l'humaine engeance du serpentueux merdier terrestre. Le sale coup d'Ève ayant mis le féminin hors-jeu dès le départ, voilà qu'enfin un petit gars de Judée, pourtant judicieusement choisi, baissait courageusement son froc, hélas sans conséquence visible et sensible pour son pâle et mâle attribut. La déconfiture patente, il avait bien fallu avoir recours au sexe des anges, et nommément à celui dudit Gabriel [2], archange de première classe, pour remonter la pente.

Cependant, tapis dans l'ombre propice de leurs synagogues, les Sages de la judéité considéraient inquiets la déloyale concurrence qui se dessinait face à leur prétention quant à l'exclusivité du Prophète annoncé, se demandant par ailleurs si cette rumeur, c'était du lard ou du cochon (à bon compte). Puis jugeant que de toute manière YHWH [3] finirait bien par y retrouver les Siens, et, afin de faire table rase d'un possible coup fourré, de l'occupant romain et de la veule complaisance du fondé de pouvoir local – un des leurs –, on obtint que, décisif souci de clarté, on sacrifiât tous les premiers de portée. [Aparté : "Plus de premier de cordée, sécurité assurée !", ne vous en déplaise Mr M.]

Ayant eu vent de l'affaire, Dieu, qui laisse toujours traîner une oreille en toute part, souffla à celle de la petite et nouvelle famille christique de chercher une porte de sortie sûre vers l'Égypte – pas encore sous surveillance étroite des drones israéliens. C'est ainsi que les Arabes, qui n'avaient pas pour l'heure leur propre candidat à la Suprême Ambassade, sauvèrent bien involontairement la mise à un christianisme à peine éclos. Fatale erreur s'il en fut. Ils devaient par la suite, les "cons" [4], en payer le prix fort. En effet, ni solidarité ni retour d'encensoir dans le commun tri-monothéisme. Chacun son Messie… et "Ite missa est". Ji vous li dit Missié [5].

À suivre [6].

NOTES :

[1] Source d'inspiration, parmi (tant) d'autres, L'Évangile selon saint Matthieu, film de Pier Paolo Pasolini, 1964, primé cette même année à la Mostra de Venise (Lion d'argent) et par l'Office Catholique du Cinéma.

[2] Encore une drôle d'histoire de genre à élucider, si possible.

[3] Ne pas confondre avec LVMH, autre déité moderne.

[4] Que l'on me pardonne – non, que l'on ne me pardonne pas ! – cette grossière insulte au genre ; c'est presque inscrit dans nos gènes – comme la haine du juif chez les goyes. Et puis, ça soulage au détour d'une démonstration quelque peu laborieuse. Sans compter que lorsque l'on a une fois entendu, par exemple, un "putain con !" très sonorement clamé selon la belle manière de Toulouse, ça vous reste dans l'oreille jusqu'à la fin de vos jours. Et avec quelle jouissance du sens verbal !

[5] Transcrit d'un sabir que toute oreille occidentale éclairée ne saurait entendre. Mais puisqu'il s'agit de forcer le trait, n'hésitons pas.

[6] Quant à la morale de cette amorale histoire, merci de patienter.

[#001/240521-240911]


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