044- Philosophie et sens de l'existence

Depuis ma lecture de l'œuvre de Marie-Madeleine Davy (1903-1998), je me demande si, dans les années 1970, nous n'aurions pas erré dans l'univers de la philosophie à la mode de ce temps-là. Pourquoi n'avons-nous jamais cherché à connaître davantage les spiritualistes dans la lignée de Bergson, Le Senne, Lavelle, Berdiaev ? Sans doute parce que nous n'en avions jamais entendu parler et que la philosophie d'alors, du moins celle qui était mise en évidence dans les cégeps et universités, tournaient autour du marxisme : Althusser, Deleuze, Derrida, voire Jean-Paul Sartre. Pourquoi avoir oublié qu'une mode intellectuelle demeurait avant tout une "mode", c'est-à-dire une étincelle, un courant dont l'Histoire ne retiendra pas grand chose ? Qui enseigne Althusser ou Rancière aujourd'hui ? Qui les lit encore ? La pensée de Karl Marx reste, toutefois.

Quand on lit Davy, on a l'impression que le milieu de la pensée en France (philosophes, historiens, sociologues) était d'une incroyable vitalité. Tous ces noms, de Gabriel Marcel à Henry Corbin, de Louis Lavelle à Nicolas Berdiaev. Toutes ces publications - revues savantes, journaux spécialisés, monographies. Qu'en est-il aujourd'hui dans la première moitié du 21e siècle ? Ce n'est certainement pas Michel Onfray qui sauvera la pensée française. Assiste-t-on à la mort de la pensée ? Je me le demande. Certes, la philosophie s'enseigne toujours au niveau collégial, même si elle a perdu des plumes ces dernières années. Mais apprend-on aux jeunes à découvrir une œuvre sans préjugé?

Mon ami Pierre s'intéresse à la philosophie ; il lit beaucoup d'ouvrages québécois. Mais je constate qu'il s'agit de philosophies politiques, donc des réflexions sur l'activité humaine, et non sur la finalité humaine. Peut-être a-t-on besoin de philosophes pour repenser la politique, pour la faire autrement, mais je crois sincèrement qu'il s'agit d'une activité intellectuelle vouée à l'échec. À quoi ça sert de repenser la politique si personne ne sait pourquoi il vit ? La philosophie doit contribuer à créer du sens, à permettre aux gens de comprendre la finalité de l'existence, sinon elle n'a pas beaucoup d'intérêt. Certes, elle peut mettre en lumière certains sophismes, certains travers, mais ce discours, si brillant soit-il, demeure limité dans la sphère d'influence politique. Les politiques n'ont que faire des universitaires qui publient un ouvrage de philosophie, la plupart du temps financé par des fonds publics. Les politiques sont tournés vers l'action, préoccupés par des échéances électorales.

Depuis quelques années, ma soif de comprendre, de donner un sens à cette vie dont la fin est proche (on parle d'une quinzaine d'années, pas davantage) occupe une grande place dans mes activités intellectuelles. Même si je continue à lire des nombreuses œuvres de fiction, notamment des romans où l'imagination tient une place de premier choix (la littérature fantasy, notamment), il n'en demeure pas moins que l'accès à la connaissance, au sens où M.-M. Davy définit ce concept, constitue une priorité pour moi. Fasse le ciel que je ne quitte pas ce monde sans en comprendre le sens.

2023, rév. 2024-04-17 : #Philosophie #Existence #Métaphysique


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